Bibliographie : M. de Steinthal

Publié par Fabrice Mundzik

M. de Steinthal est un pseudonyme non reconnu officiellement par Renée Dunan.

Il fut néanmoins très rapidement dévoilé par la presse de l'époque (cf. préface de "Le Roman de la fin des Hommes" (Les Moutons électriques - 2015)) et plusieurs documents prouvent, sans aucune constetation possible, qu'il s'agit bien de Renée Dunan.

Il ne fut utilisé que pour le roman "L'Amant trop aimé ou comment sept maîtresses peuvent mener un amant à la Bastille et la huitième l'en faire sortir", publié en 1925 par les éditions Henry-Parville.

Il s'agit du deuxième ouvrage paru dans la collection Oeuvre littéraire inédite.

Précisons que le nom complet est M. Antoine Blaise Longel de Steinthal.

Dans l'annonce publicitaire, publiée dans le premier tirage de Renée Dunan "Kaschmir, Jardin du bonheur" (Henry-Parville - 1925), il était annoncé que :

"Parmi les prochaines Œuvres Littéraires Inédites on trouvera des romans anciens retrouvés en manuscrits dans une célèbre bibliothèque, et des traductions d’œuvres étrangères à sensation."

Dans la préface de "L'Amant trop aimé", Renée Dunan explique :

"Comme on apportait le café au lait matinal dans ma chambre d'hôtel, la servante, une gaillarde souriante et bonne enfant, qui paraissant sortir toute crue d'un conte drolatique de Balzac, me demanda si je pensais aller à la vente."

Elle précise aussi qu'elle a trouvé le manuscrit de M. de Steinthal en Anjou :

"Avec ma Provence natale, l'Anjou est en France un de mes pays préférés".

Les éditions Henry-Parville avaient aussi annoncé, sur le même principe, un "Conte drolatique inédit de Balzac retrouvé par l'auteur". Les relations tendues entre Renée Dunan et son éditeur, les problèmes financiers de ce dernier, sont certainement à l'origine de son annulation.

Bibliographie : M. de Steinthal

Bibliographie : M. de Steinthal

Cet ouvrage a servi de preuve, lors du procès qui opposa Renée Dunan à Albert Febvre (alias Henry-Parville) pour non-paiement de "la redevance de 0.30 par livre sur quarante mille exemplaires". (extrait d'un constat d'huisser, daté du 19 février 1926, conservé à la Bibliothèque Marguerite Durand).

Un article, paru dans La Tribune de Lausanne du 8 mars 1926, résume très bien les origines de cette affaire :

A malin, malin et demi

Mme Renée Dunan intente aux éditions Henry Parville un procès peu banal.

Directrice, dans cette maison, d'une collection d’œuvres inédites, Mme Dunan fit paraître, il y a quelque temps, un roman de M. de Steinthal : L'Amant trop aimé. Dans une « introduction » elle expliquait comment elle trouva et acheta tout un lot de manuscrits anciens où elle découvrit l’œuvre de M. de Steinthal qu'elle qualifiait de « petit chef-d’œuvre digne de ceux que signèrent les auteurs galants du siècle de l'amour ».

Le roman paru, Mme Renée Dunan réclama à la maison Parville les droits d'auteur du livre de M. de Steinthal.

— M. de Steinthal, avoua-t-elle, n'existe pas. Imagination que la découverte des manuscrits.

— Tromperie sur l'origine de l’œuvre ! réplique M. Henry Parville. Je ne vous dois aucun droit d'auteur.

Les tribunaux décideront.

Albert Jean Baptiste Febvre (libraire-éditeur) fut "déclaré en état de faillite le 23 août 1927".

"L'Amant trop aimé" a connu deux tirages :

La première édition fut imprimée à 20000 exemplaires.

Le deuxième tirage devait être de 20000 exemplaires (même quantité que pour le premier), mais "le tirage a été moindre" selon Renée Dunan : il n'est donc pas connu précisement...

Ce roman a aussi été inclus dans un recueil présenté ainsi : "Renée Dunan, M. de Steinthal, Jeanne Landre présentent 3 jolis romans légers complets".

Quelle fut la motivation pour ce second tirage ? Des ventes plus rapides que prévues ?

Pas du tout... C'est à cause d'une erreur, non corrigée par Renée Dunan lors de la relecture des épreuves : M. de Steinthal était censé être l'auteur de ce roman, or, ce sont les livres de Renée Dunan qui sont indiqués dans la liste des "ouvrages du même auteur" !

Le 2 novembre 1925, dans un courrier dactylographié conservé à la Bibliothèque Marguerite Durand, elle s'adresse au directeur de la Société Française d'Impimerie d'Angers :

Monsieur,

Excusez moi de déranger le tirage de mon Amant trop aimé, mais s'il en est temps encore ayez l'obligeance de remplacer "l'auteur" par "la préfacière" dans la page face au titre au dessus de l'énumération de mes autres ouvrages.

S'il est trop tard, tant pis. Mais puisque j'ai déjà enlevé mon nom il faut harmoniser le reste [...]

Bibliographie : M. de SteinthalBibliographie : M. de Steinthal

Bibliographie : M. de Steinthal

La suite du courrier concerne sa préface à L'Enfer du bagne de Tullio Murri et des éditions luxe qu'elle souhaite faire tirer.

Le 23 février 1926, elle le recontacte (elle prépare son procès contre les éditions Henry-Parville) afin de lui demander une confirmation écrite de ces modifications et prouver qu'elle est bien l'auteur de l'ouvrage.

Un autre document, envoyé à son avocat, nous apporte les informations suivantes :

Epreuve du titre, avec nom d'auteur en blanc (M. de Steinthal est entre parenthèses en bas). On avait, sur demande Parville, décidé en effet que Renée Dunan ne signerait pas, mais on n'avait pas décidé du pseudo.

[...] Renée Dunan reçut du correcteur professionnel M A Raveaud, 27 rue Championnet) une lettre d'avis sur la façon dont elle avait pastiché le style ancien.

[L'éditeur] a lu le manuscrit que lui avait remis Renée Dunan, et il a demandé qu'on effaçat le nom, mais il a laissé subsister la liste sans équivoque des "livres du même auteur".

A lire aussi :

Renée Dunan, directrice de la collection Œuvre littéraire inédite

Annonce publicitaire pour la collection Œuvre Littéraire Inédite (Henry-Parville - 1925)

Renée Dunan "Kaschmir, Jardin du bonheur" (Henry-Parville - 1925) [Papier Alfa]

Renée Dunan "Kaschmir, Jardin du bonheur" (Henry-Parville - 1925) [version 1]

Renée Dunan "Kaschmir, Jardin du bonheur" (Henry-Parville - 1925) [version 2]

Annonce publicitaire pour "La Viedaze et la Nicette : Conte drôlatique inédit de Balzac retrouvé par l'auteur" (1925-1926)

M. de Steinthal "L'Amant trop aimé" (Henry-Parville - 1925)

M. de Steinthal "L'Amant trop aimé" (Henry-Parville - 1925) [Réimpression]

 

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